Vieux et mickeys une histoire de tradition à l’école

Au moment ou certains rites et traditions tendent à disparaître à l’école, je voulais rappeler à notre souvenir et conter aux plus jeunes l’histoire des vieux et mickeys à l’école.

Quand à l’école on disait vieux, cela correspondait plus à ceux d’entre nous à l’entrée qui avaient l’âge au dessus de celui requis, c’est à dire 12-14 ans. Ce n’était pas nécessairement vieux au sens exclusif du terme, même si quelques uns pouvaient s’inscrire dans ce tableau. En revanche, les mickeys étaient ceux qui venaient à l’âge requis tel que ci-haut cité.

À l’école être vieux ou mickey avait ses avantages et ses désavantages. Les vieux étaient toujours repérés tout de suite par les anciens et c’est eux qui subissaient et supportaient le sort de tous. Il valait mieux être convoqué dans la zone d’un ancien avec un vieux. Souvent on se rabattait plutôt sur lui, même si généralement les anciens vous brimaient indistinctement. Ce qui est aussi vrai, les anciens aimaient brimer les vieux et curieusement c’était souvent leurs mickeys qui emmerdaient les vieux. Surtout, il ne fallait pas s’isoler pour brimer un vieux car dans cet enthousiasme, un geste brutal d’un vieux qui résiste pouvait t’esquinter.

Les vieux étaient furieux lorsque surtout les mickeys les brimaient, mais à l’école, l’ancien était sacré. Cette force rendait les vieux impuissants car elle intègre l’esprit d’enfant de troupe où l’obéissance et la discipline étaient la règle d’or. Ainsi, les vieux devaient se plier, même si par le bord, les anciens étaient un peu vicieux. Ils tiraient parfois les poils des mollets en forme de bouteille d’eau Perrier et sur leurs poitrines musclées comme celles de pigeons, pour les forestiers; ou écorchaient leurs moustaches. C’était très douloureux.Face à tout ce qui apparaissait à leurs yeux comme une humiliation, ils devaient se taire, c’était tellement formateur d’humilité, de respect et de discipline. Le vieux qui était surpris par les anciens en train de résister à l’un d’eux fusse-t- il mickey, il devait « baver » et était remis à sa place. Il en avait pour son compte car malgré tout les autres anciens veillaient toujours.

En revanche, être mickey comportait aussi des risques et surprises. Premièrement, leurs yeux de gamins étaient très vite violés par la nudité impressionnante des vieux à la douche où les bains étaient collectifs et il fallait s’inscrire dans le créneau indiqué. C’était si nouveau pour eux de se mêler ainsi à des plus grands. En second lieu, lorsqu’un vieux était en bas sur le lit superposé de 6e, le mickey devait éviter de le pietiner pour monter sur le sien. C’était une exigence quasi belliqueuse des vieux qui parfois voulaient se défouler d’une brimade subie chez les anciens. De même, il fallait s’abstenir de se moquer d’un vieux ou de rire lorsqu’il avait les yeux rougis par la baffle d’un ancien. Il fallait également éviter de se « rattraper » sur les effets ( kangourou, maillot de corps et autre effet d’un vieux. Te surprenant, il pouvait te régler ton compte.

Les vieux cependant avaient l’avantage pour nombreux d’entre eux d’avoir déjà été au collège et le 1er trimestre sinon l’année de 6e constituait une simple formalité pour eux avant que certains ne s’essoufflent vers la 5e ou 4e pour rentrer dans les rangs. De même, les vieux étaient favorisés par le barème à l’école. Je me rappelle qu’au sport ceux de ma promotion s’en souviennent, on était frappé par un avis tranché de l’instructeur d’éducation physique, l’adjudant chef Houaro ( 1972-1973).

En effet, selon le barème établi, ceux de 12-13 ans devaient lancer le poids de 3kg et ceux de 14 ans et plus celui de 5kg.Or, il y a un vieux qui lui, avait 12 ans sur le papier et a balancé à plus de 20m le poids de 3kg qui correspondait à la première catégorie, tandis que le mickeys qui en avait 14 ans se battait à passer 10m avec le poids de 5kg reservé à la 2e catégorie. Exténué, il est allé voir l’instructeur pour réclamer en ces termes: Mon adjudant chef, TEL devrait normalement lancer le poids de 5kg. L’A/c surpris, s’interrogea pourquoi, tout de suite consulta son cahier et rétorqua, mais TEL à 12 ans? Non ce n’est pas son vrai âge repris notre mickeys. Mais comment ça? C’est bien son âge marqué noir sur blanc ici, répondit agacé l’A/c Houaro. Aussitôt, d’un ton ferme, il rebondit: Écoutez, monsieur, c’est le barème et le barème, c’est le barème. Le vieux qui n’a pas visiblement suivi cette discussion, occupé à ses exploits s’en tira avec une note de 17/20 pendant que le mickey cherchait difficilement 10/20.

Mieux encore, sur le principe « un commet tous passent », si à l’origine du motif c’était un mickey, il en avait pour son compte. Malgré tout, les vieux étaient souvent protecteurs entre les bleus, parfois on les accusait et ils subissaient pour avoir été cités comme meneur. De même, ils étaient les cibles privilégiées des anciens qui aimaient les brimer en groupe. C’est aussi eux qu’on massait en premier, même sans motif, pour soit disant les dissuader de ne pas mener la fronde contre les anciens.

Mais au centre de toutes ces relations asymétriques se formait un sentiment de puissante fraternité, des enfants éduqués et élevés dans l’épreuve, l’effort en préparation de la vie de soldat trempé. C’était aussi ça l’esprit enfant de troupe, puissant fondateur de l’esprit AET.

AET Jean-Aive Allakoua Mle 1275

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